Lasers
Un groupe de chercheurs des laboratoires Bell découvre un effet laser dans le xénon en 1962. Les scientifiques constatent ensuite qu’un ajout d’hélium au milieu actif augmente le gain d’amplification du laser.
Un dimère (Xe2) excité par un faisceau d’électrons sert pour réaliser le premier laser à excimère. Ce dernier produisait une émission stimulée dans l’ultraviolet avec une longueur d’onde de 176 nm. Les lasers excimères ou à exciplexes recouraient au chlorure de xénon et au fluorure de xénon. La dermatologie trouve une application aux lasers à excimères de chlorure de xénon. Il est possible de générer une émission à 354 nm avec du XeF4, 308 nm avec le XeCl, et 282 nm avec le XeBr. Le laser à fluorure de krypton, quant à lui, offre une émission dans le proche ultraviolet à 248 nm.
Le xénon en médecine
La médecine trouve des applications au xénon en anesthésie et en imagerie médicale.
Anesthésie
Le xénon est utilisé en anesthésie générale inhalatoire malgré son prix. En 2008, seuls les deux CHU de Nîmes et de Bordeaux étaient équipés dans toute la France. Plus tard, les CHU de Clermont-Ferrand et de Poitiers s’en sont servis pour essai.
Il ne faut toutefois pas utiliser le xénon pour anesthésier des patients fragiles sur le plan respiratoire. En effet, ses propriétés anesthétiques ne fonctionnent qu’à des concentrations élevées (supérieures à 60 %). Cela réduit l’apport en dioxygène à 40 %, ce qui est insuffisant pour ces personnes.
L’anesthésie au xénon ne compte pas beaucoup d’effets secondaires. En effet, les patients ne font pas de baisse de pression artérielle et le réveil ou le retour à la conscience est plus rapide. Seulement, le gaz reste coûteux. Voilà pourquoi son usage demeure limité.
L’effet du xénon en anesthésie s’explique par deux mécanismes Premièrement, l’inhibition de Ca2+ ATPase s’effectue dans la membrane plasmique synaptique. Cette protéine contribue à transporter le calcium. L’inhibition s’explique par un changement conformationnel lorsque le Xe s’associe à des sites non polaires dans la protéine. Deuxièmement, le mécanisme impliquerait des interactions non significatives entre la couche lipidique et l’anesthésiant.
Le xénon dispose par ailleurs d’une concentration alvéolaire minimale (MAC) estimée à 71 %. Son pouvoir anesthésiant est moitié plus fort que le protoxyde d’azote. Il convient notamment de s’en servir avec de l’oxygène afin d’éviter l’hypoxie. Le xénon est différent du protoxyde d’azote, car il ne s’agit pas d’un gaz à effet de serre. Il ne présente donc aucun danger pour l’environnement. En revanche, en raison de son coût élevé, ses applications nécessitent un système fermé afin de pouvoir le recycler et le réutiliser. Cette partie se fait par filtration et purification.
Le xénon dans l’imagerie médicale
L’imagerie médicale utilise deux techniques distinctes impliquant le xénon. Il s’agit de l’utilisation du xénon hyperpolarisé et celle du radioisotope 133.
Xénon radioactif 133Xe
Le xénon sert principalement dans l’imagerie du cerveau, des poumons ou du cœur. La tomographie d’émission monophotonique produit l’émission gamma du radioisotope 133 du xénon. Ce dernier sert aussi à mesurer le flux de sang.
Xénon hyperpolarisé
Un moment angulaire non nul caractérise les noyaux de deux isotopes stables du xénon : 129Xe et 131Xe. L’hyperpolarisation de ces noyaux se produit après un protocole complexe.
Les isotopes sont immergés dans des vapeurs d’éléments alcalins ou d’azote. Ces vapeurs d’alcalin sont produites par chauffage du rubidium métal à plus de 100 °C.
Puis, ils sont exposés à un flux laser polarisé de manière circulaire. La longueur d’onde du laser doit correspondre à une des raies d’absorption de l’alcalin.
Leurs spins nucléaires s’alignent alors dans un processus d’échange. Le flux laser polarise les électrons de valence de l’alcalin. Ces derniers transmettent leur polarisation aux noyaux de xénon grâce à un couplage magnétique hyperfin.
La polarisation des spins des noyaux de xénon peut être largement supérieure à la valeur d’équilibre estimée par une distribution de Boltzmann. Elle peut aller au-delà de 50 % de sa valeur maximale possible. On parle alors d’hyperpolarisation.
Le noyau du 129Xe dispose d’un spin nucléaire de I = 1/2. À cet effet, il n’a pas de moment quadripolaire électrique. Lors de collisions avec d’autres atomes, il ne subit donc pas d’interaction quadripolaire. Cela permet de garder l’hyperpolarisation pendant un long moment. Cela s’applique même après coupure du laser et élimination des vapeurs de l’alcalin par condensation sur une surface à température ambiante.
Le « temps de relaxation T1 » est la durée nécessaire à la distribution de spins pour retourner à sa polarisation d’équilibre définie par la statistique de Boltzmann. Pour le 129Xe, T1 varie de quelques secondes à quelques heures ou à quelques jours. Dans le premier cas, les atomes de xénon sont dissous dans du sang. Dans le second cas, il s’agit du xénon gazeux. Dans le dernier cas, le xénon est à l’état solide.
Grâce à l’hyperpolarisation du 129Xe, sa détection par imagerie par résonance magnétique est notablement plus sensible. Cela permet aussi de réaliser des images de poumons, ce qui est en principe difficile par d’autres techniques et avec d’autres tissus. Les flux gazeux dans les poumons peuvent, par exemple, être visualisés grâce à cette technique.
En outre, des recherches ont été menées pour encager le xénon dans un environnement spécifique. Le but est de pouvoir observer sélectivement des parties du corps ou des cellules particulières. La cage pourrait être une émulsion lipidique destinée à des études neurologiques. Un encagement par cryptophane a été étudié pour servir de biorécepteur.
Contrairement au 129Xe, le 1311Xe dispose d’un spin nucléaire I = 3/2. Son moment quadripolaire est donc non nul. Le temps de relaxation varie de quelques millisecondes à quelques secondes.
Autres utilisations du xénon
Le xénon trouve des applications dans les domaines où une masse moléculaire élevée et un caractère inerte sont requis. Il se trouve dans les chambres à bulles et les détecteurs.
Pour détecter des Weakly Interacting Massive Particles ou WIMPs, le xénon liquide constitue un milieu propice. Lorsque ce type de particule entre en collision avec un atome de Xe, en principe, il lui arrache un électron et l’on peut observer une scintillation. Cette interaction est relativement facile à distinguer d’autres événements similaires que des particules telles que les rayons cosmiques engendrent. L’expérience XENON du laboratoire italien du Gran Sasso n’a cependant pas permis de confirmer l’existence d’une WIMP.
Toutefois, ces études contribuent à faire avancer la connaissance de la matière noire et d’autres modèles de physique. Le détecteur du Gran Sasso est, en effet, cinq fois plus sensible que n’importe quel autre instrument mis au point. Au cours de l’année 2008, l’appareil a fait l’objet d’une amélioration quant à sa sensibilité.
La propulsion ionique des engins spatiaux se réalise presque toujours avec du xénon. Cela s’explique par sa faible énergie d’ionisation par unité de masse atomique. Par ailleurs, il est possible de le stocker et le transporter sous forme liquide à des températures avoisinant la température ambiante mais sous haute pression. Il peut être facilement ramené à l’état gazeux pour alimenter le moteur.
En raison de son caractère inerte, le xénon est aussi moins corrosif et moins polluant pour les moteurs ioniques. Il est donc préféré au mercure et au césium. Le xénon a servi pour alimenter les moteurs ioniques des satellites dans les années soixante-dix. Il a aussi été utilisé en guise de propulseur pour « Smart 1 », le véhicule spatial européen. Puis, la sonde américaine « Dawn » a été pourvu de trois moteurs ioniques carburant au xénon.
Pour produire des microsystèmes électromécaniques ou MEMs, le silicium est attaqué par du dioflorure de xénon (XeF2). La réaction du difluorure de xénon avec l’uracile permet d’obtenir du fluorouracile, un médicament anticancéreux. Le xénon sert à résoudre la structure des protéines lors d’une diffraction. Cet élément se niche dans les cavités hydrophobes des protéines une fois exposée à une pression entre 0,5 et 5 MPa. La phase peut être retrouvée grâce à la dérivation aux atomes lourds.
Le xénon : précautions et mesures de sécurité
Le xénon non radioactif peut servir d’anesthésiant si le patient ne présente pas de fragilité respiratoire.
Le 133Xe (radioactif) constitue un agent souvent utilisé par certains biologistes et médecins pour des études fonctionnelles du poumon. Il est également utilisé pour établir certains diagnostics. Dans les deux cas, il existe une certaine dose à respecter, prévue par le protocole.
Le xénon se dissout vite dans la majorité des caoutchoucs et des plastiques. Si la fermeture de son contenant est constituée de ces matières, le xénon s’échappera progressivement. Dans les conditions normales de pression et de température, il peut être stocké sans risque. Les containers doivent, toutefois, être en verre ou en métal scellés.
Le stockage du 133Xe nécessite des précautions particulières car il est coûteux et radioactif. L’isotope est produit à partir d’uranium 235 lors de sa fission. Il est distribué dans des flacons de 2 ml avec 370 ou 740 mégabecquerels (10 ou 20 millicuries) de xénon.
Supposons qu’à l’étalonnage avant stockage ou expérience, le gaz préparé ne contienne pas plus de 0,3 % de 133Xe. Il ne posséderait pas plus de 1,5 % de 131Xe et pas plus de 0,06 % de 85Kr. La quantité de 131I, quant à elle, ne dépasserait pas 0,01 %. Pas moins de 99,9 % de la radioactivité du gaz provient du radioxénon. Ce dernier est connu pour se comporter dans l’organisme comme du xénon non radioactif. La composition va changer avec le temps. Ce phénomène est dû à la décroissance radioactive et aux éventuelles fuites après transvasement dans les contenants.
Même stockées fermées, les bouteilles « multi-injections » de 133Xe des années soixante et soixante-dix perdaient 5 à 6 % de leur xénon chaque jour. Plus tard, la fuite a été réduite de 70 à 80 % grâce au froid.
Une seringue en plastique remplie d’une solution au xénon perd de 0,5 à 1 % de son contenu par heure. Cet élément, peu soluble dans les solutions salines, peut se délier d’une substance et s’infiltrer dans le joint de caoutchouc du piston de la seringue. Par conséquent, 0,5 ml de solution de xénon dans une seringue de 2,5 cm3 peut être réduite de la moitié de son xénon en 2 heures.
Le xénon radioactif peut être dangereux pour l’environnement. À cet effet, tout système de délivrance par inhalation du gaz 133Xe doit être parfaitement étanche. Il s’agit par exemple de respirateur, ainsi que les accessoires, assemblages et tubes associés Une protection par un système d’aération et de filtration adéquat est nécessaire.
Le xénon à l’état pur n’est pas toxique. Toutefois, il peut atteindre le cerveau en franchissant la barrière hématoencéphalique. Par ailleurs, il se dissout aisément dans le sang. Selon la dose, il peut engendrer une anesthésie partielle ou totale. Au-delà d’une certaine quantité, il asphyxie. Les composés du xénon sont toxiques. En raison de leur pouvoir oxydant considérable, plusieurs d’entre eux sont aussi explosifs. Cela s’explique aussi par la tendance du xénon et du dioxygène à se séparer.