Les propriétés de la substance
Plusieurs points sont à mettre en exergue sur les caractéristiques physiques et chimiques du thorium.
Propriétés physiques et chimiques de la substance
Le thorium à l’état pur se présente comme un métal de couleur gris-blanc. Il peut garder son lustre pendant quelques mois en raison de la présence d’un oxyde qui le protège. L’oxygène est notamment l’élément qui le ternit. Ainsi, une fois exposé à l’air, il devient gris, puis noircit totalement.
Le dioxyde de thorium (ThO2) constitue l’un des meilleurs matériaux rétractiles. Il dispose d’une température de fusion de 3 300 °C.
En principe, la poudre de Th métal est pyrophorique, d’où la nécessité de le manipuler avec soin. Une fois chauffés dans l’air, les copeaux de Th peuvent s’enflammer et brûler tout en brillant avec une lumière blanche.
Le thorium est l’élément ayant la température de plage la plus élevée pour son état liquide. En l’occurrence, à pression atmosphérique, on a 3 033 K entre son point d’ébullition et son point de fusion.
Isotopes du thorium
Les isotopes du Th sont tous radioactifs. À l’état naturel, le thorium se compose uniquement de 232Th disposant d’une très longue demi-vie de 14 milliards d’années. L’abondance considérable du 230Th ne rend pas cet élément mononucléidique. Le 232Th constitue un isotope fertile qui se transmute en 233Th radioactif après l’absorption d’un neutron. Suite à cela, l’élément se désintègre en protactinium 233 qui se décompose et devient de l’uranium 233 (fissile).
L’activité massique de la substance est de 4,10 × 103 Bq/g.
Radiotoxicité de l’élément
Par rapport aux autres matières radioactives, le thorium naturel se désintègre plus lentement. En outre, les rayonnements α émis ne peuvent pas pénétrer la peau humaine.
Même en petite quantité, il est dangereux de détenir et de manipuler cet élément comme celles présentes dans un manchon à incandescence. Il est donc préférable de ne pas inhaler ou avaler la substance, par exemple à la suite d’un feu de Th dans l’industrie nucléaire.
Le Th constitue un danger radiologique pour les poumons et les autres organes internes une fois inhalé ou ingéré en grande quantité. Les rayonnements α sont notamment les principales menaces qui agissent sur ces parties du corps humain. Ainsi, le risque de cancer du poumon, du pancréas ou du sang s’accroît à la suite d’une exposition massive à un aérosol de Th. L’ingestion d’une dose importante de l’élément augmente aussi le risque de maladies du foie.
Étant consommée, la radiotoxicité du thorium 232 (unique isotope naturel) est de 2,3 × 10-7 Sv/Bq. Elle est de 1,1 × 10-4 Sv/Bq lorsqu’on l’inhale. Il faut noter que l’activité massique du Th est de 4,1 kBq/g. À cet effet, on peut atteindre une dose efficace d’un sievert par inhalation de 2,22 g ou par ingestion de 1,06 kg de Th. Cela reste, cependant, dangereux à réaliser en une seule fois.
La valeur limite d’exposition des travailleurs nucléaires par an est de 20 mSv. Cela correspond à 4,44 mg de 232Th inhalé. On ne compte ici que la valeur d’exposition annuelle du 232Th. Le Th naturel est, néanmoins, en équilibre séculaire avec ses descendants. Ainsi, on peut considérer la radiotoxicité de ceux-ci. Cet élément se trouve alors parmi les radionucléides les plus nocifs qui existent.
Le thorium ne joue aucun rôle connu dans la biologie. En revanche, il sert parfois d’agent de contraste pour les radiographies.
On peut obtenir du « thoron » (220Rn), un émetteur α, dans la chaîne de désintégration du thorium. Il présente un risque radiologique théorique au même titre que tous les isotopes du radon. Il se présente à l’état gazeux. On peut donc l’inhaler facilement. En pratique, il est très peu mobile en raison de sa demi-vie très faible (55,6 s). Il convient alors de bien ventiler les endroits où l’on stocke et manipule le Th en grande quantité.
La géologie et la minéralogie du thorium
Il faut aussi parler de la présence de l’élément sur Terre. Ci-après les détails.
Abondance et gisements de l’élément
Le thorium 232 est trois à quatre fois plus abondant que l’uranium 238 sur la planète. Il est peu radioactif et se désintègre tout en douceur. Sa demi-vie est de 1 405 × 1010 années. Cela correspond à trois fois l’âge de la Terre. Seulement un cinquième du Th présent sur cette dernière s’est désintégré pour donner du plomb 208 en fin de chaîne radioactive. Le 232Th est l’élément possédant la plus longue demi-vie dans la chaîne de désintégration du 244Pu. Il s’agit d’une radioactivité éteinte.
Le thorium est présent en petite quantité dans la majorité des roches et des sols. Par rapport à l’uranium, il est quatre fois plus abondant. Cependant, il est presque aussi fréquent que le plomb. Dans un terrain normal, il existe 12 ppm (parties par million) de Th.
On peut trouver cet élément dans plusieurs minéraux. Les minerais de Th sont la thorianite ThO2 et la monazite (Ce,La,Nd,Th)PO4. Ce dernier est le plus commun. On a aussi le phosphate de thorium et de terres rares contenant 12 % ThO2.
Les gisements majeurs de Th se situent en France, en Australie, en Inde et en Turquie. Par ailleurs, de la monazite avec une teneur importante en Th est présente en Afrique, en Antarctique et en Australie. On peut aussi trouver cela en Europe, en Amérique du Nord et en Amérique du Sud.
Il est possible de distinguer des isotopes du thorium à l’état de traces. En l’occurrence, dans la chaîne de désintégration de l’élément (228Th, 1,91 an). De plus, on a celle de l’uranium 238 (le 230Th, 75 000 ans) et de l’uranium 235 (le 231Th, 25,2 h). En raison de leur courte durée de vie, leur activité massique est importante. Cela les rend plus radioactifs que le 232Th. Pourtant, en termes de masse, ils sont peu abondants.
Extraction minière du thorium
Le thorium provient de la monazite et son traitement se fait en plusieurs étapes. D’une part, on dissout le sable de monazite dans un acide inorganique, dont l’acide sulfurique (H2SO4). D’autre part, on extrait le Th dans une phase organique se composant d’une amine. On le sépare ensuite avec des ions tels que les nitrates, le chlorure, l’hydroxyde et le carbonate. Cela fait passer l’élément en phase aqueuse. On précipite le Th sous forme impure et on le recueille pour le convertir en nitrate de thorium.
Il est aussi possible d’exploiter la réaction entre la monazite et une solution concentrée d’hydroxyde de sodium (NaOH). Une fois traité avec un acide inorganique tel que l’acide chlorhydrique (HCl), il produit un hydroxyde solide. On peut aussi ajouter de l’hydroxyde de sodium à la solution pour obtenir de l’hydroxyde de thorium relativement impur. Il est possible de séparer ce dernier de la solution. Lorsque l’hydroxyde obtenu se trouve au contact d’acide nitrique (HNO3), on obtient du Th(NO3)4.
On peut purifier le nitrate résultant par dissolution dans du phosphate de tributyle dilué dans un hydrocarbure adapté. Il convient ensuite d’exposer la solution à de l’acide nitrique. En conséquence, on peut éliminer la majorité des terres rares résiduelles et d’autres impuretés métalliques. L’U reste dans la même solution que le Th. Pour les séparer, il faut exposer le phosphate de tributyle à de l’acide nitrique. Cela laisse l’uranium dans cette solution. Le Th est alors extrait.
Une fois purifié, on peut thermolyser le nitrate de thorium pour obtenir du ThO2.
Pour réduire ce dernier, il faut passer par le ThF4 qui se forme grâce à la réaction entre le ThO2 et le HF gazeux. On mélange ensuite du ThF4 avec du calcium et un halogénure de zinc, le tout sous forme pulvérulente. On expose le mélange à une température avoisinant les 650 °C pour donner un alliage de thorium et de zinc. On peut aussi obtenir du chlorure ou du fluorure de calcium en fonction des réactions.
ThF4 + 3Ca + ZnCl2 ⟶ Th + Zn + 2CaF2 + CaCl2 ;
ThF4 + 3Ca + ZnF2 ⟶ Th + Zn + 3CaF2. On porte ensuite l’alliage obtenu à une température supérieure à 907 °C. Il s’agit du point d’ébullition du Zn, mais le point de fusion du Th est en dessous. Cela laisse une éponge de Th fondue et moulée en lingots.