Industrie nucléaire
Dans l’industrie nucléaire, le radium extrait de l’uranium a d’abord été utilisé à des fins médicales. La principale utilisation contemporaine de l’élément U exploite plutôt ses propriétés nucléaires. Comme l’U 235 est un isotope fissile, il est employé dans les réacteurs nucléaires après un éventuel enrichissement. Il a aussi une place importante dans la fabrication d’armes nucléaires une fois qu’il est fortement enrichi. L’U 238 est à la fois fissile (dans les réacteurs à neutrons rapides) et fertile (puisqu’il se transforme en 239Pu). Ainsi, cette double caractéristique est exploitée dans le cycle du combustible nucléaire si les cycles sont fondés sur la combustion du plutonium. Enfin, l’uranium 233 est fissile en neutrons thermiques, ce qui est à la base d’un cycle surgénérateur fondé sur le thorium.
Médecine nucléaire
La médecine nucléaire fait référence à toutes les applications médicales de la radioactivité en médecine. On parle surtout des sources radioactives non scellées. Parmi les domaines d’application figure l’imagerie fonctionnelle in vivo (scintigraphies et tomographes par émission de positons). On retrouve aussi la radiothérapie métabolique (traitant les maladies bénignes et malignes) ainsi que la radio-immunologie (diagnostic biologique in vitro). Ainsi, la médecine nucléaire est une spécialité à la fois thérapeutique et diagnostique.
Contrôle des matières nucléaires
L’article R1333-1 du Code de la défense vise à protéger les matières nucléaires et les activités associées contre les pertes et les actes de malveillance. Cette réglementation a aussi pour but d’éviter la prolifération nucléaire et de prévenir tout inconvénient ou risque pour l’environnement, la santé, la salubrité et la sécurité publique. Les matières soumises à ces dispositions sont le lithium 6, le tritium, le thorium, le plutonium et l’uranium.
Uranium appauvri
L’uranium appauvri est un sous-produit (résidu apparaissant lors d’une opération chimique) de l’enrichissement de l’élément. Il se démarque par sa dureté et sa densité.
Usage militaire
Dans le domaine militaire, l’uranium appauvri est très apprécié pour ses propriétés mécaniques. Pyrophorique, il est employé comme arme antichar grâce à ses capacités incendiaires et pénétrantes. Lorsqu’il est projeté à très haute vitesse, il traverse facilement les blindages. Il s’enflamme lors de l’impact, ce qui provoque un incendie pouvant exploser le véhicule touché. C’est la raison pour laquelle des obus de 20 à 30 mm des hélicoptères et des avions-chasseurs de chars ont été utilisés pendant les guerres du Golf et du Kosovo. Ce type d’uranium a aussi servi de plaque de blindage.
Selon l’Organisation mondiale de la Santé, les populations se trouvant dans les zones de conflit où de l’uranium appauvri a été employé n’ont pas besoin de dépistage. Elles ne passent pas non plus de contrôle généralisé des éventuels effets de cet élément sur leur santé. Les individus ayant été exposés à des doses excessives sont tenus de consulter leur médecin. Ce dernier les examinera, les traitera s’ils ont des symptômes et assurera le suivi de leur état. En ce qui concerne les militaires blessés par des fragments d’uranium appauvri, l’élément n’a aucun effet indésirable apparent sur leur santé. Des concentrations décelables d’uranium appauvri apparaissent seulement dans leur urine. Plus de 95 % de l’uranium entrant dans l’organisme est éliminé via les urines et les selles.
Usage civil
Lorsqu’il est complété par du plutonium, l’uranium appauvri devient ce qu’on appelle un combustible MOX. Comme l’U 238 se transforme en plutonium 239 fissile par irradiation, ce combustible nucléaire sert d’élément fertile dans les réacteurs. Il contribue ainsi au recyclage de l’élément Pu.
En aviation, l’uranium appauvri a été utilisé comme contrepoids sur les McDonnell Douglas DC-10, les premiers Boeing 747, les Lockheed L-1011 Tristar… Un contrepoids sert à équilibrer, à amortir ou à ajuster les forces autour d’un axe de rotation. Dans ce domaine, il est progressivement remplacé par l’élément chimique tungstène. Autrefois, la quille de certains voiliers de compétition a aussi contenu ce type d’uranium. Son usage est désormais interdit par la réglementation. Enfin, l’uranium appauvri témoigne une plus grande efficacité en matière de protection radiologique des écrans par rapport au plomb.
Les professionnels ne devraient pas être victimes d’exposition excessive par ingestion d’uranium appauvri si les mesures de sécurité étaient prises sur leur lieu de travail. Les études à long terme démontrent que les troubles de la fonction rénale pouvant apparaître sont temporaires. De ce fait, la fonction rénale revient à la normale une fois la source de l’exposition excessive éliminée.
Imprégnation des populations humaines
Apparemment, l’imprégnation des populations humaines est plus élevée dans les mines d’uranium. Tel est également le cas chez les personnes travaillant dans l’industrie nucléaire, particulièrement dans le raffinage, l’extraction et la production de combustible nucléaire ainsi que son retraitement. Certains militaires ont été potentiellement exposés aux vapeurs ou aux particules de munitions à uranium appauvri dans le golfe Persique en 1990-1991. Ils sont ainsi susceptibles d’avoir développé le « syndrome de la guerre du Golfe ». Toutefois, le rôle de l’uranium appauvri dans le développement de ce syndrome n’a pas encore été prouvé.
Ces individus ont plutôt incorporé de l’uranium à la suite d’une blessure, par inhalation ou par ingestion. Il convient de retourner dans le passé pour connaître leur niveau d’exposition à l’uranium pur et/ou aux composés suivants. On parle du nitrate d’uranyle, de l’hexafluorure d’uranium, du tétrafluorure d’uranium, du tributylphosphate d’uranium, du diuranate d’ammonium, du fluorure d’uranyle et du dioxyde d’uranium. On cite aussi le trioxyde d’uranium, le tétraoxyde d’uranium, l’hexafluorure d’uranium, les effluents uranifères acides, le sesquioxyde d’uranium et le fluorure d’uranyle.
L’épidémiologique à grande échelle a déjà permis d’explorer les effets de l’irradiation externe au milieu des années 2000-2010. Les effets de l’exposition interne, particulièrement le risque de cancer, par l’incorporation des particules d’uranium sont encore mal évalués. C’est la raison pour laquelle la multinationale française Areva (actuelle Orano) a mené le projet Alpha risk project. L’intégration de l’uranium peut aussi passer par l’ingestion de boissons alcoolisées et le tabagisme.
Une évaluation de l’imprégnation d’uranium, de douze autres métaux ou métalloïdes et de quelques polluants organiques par des femmes enceintes a été publiée en 2018. Cette étude a été menée dans le cadre du programme national de biosurveillance. Son volet périnatal a permis de constater que seuls 28 % du panel présentaient une quantité détectable d’uranium dans leurs urines. Le panel comprenait 990 femmes enceintes arrivant à la maternité et ayant accouché en 2011, et ce, sur le territoire français (hors Corse et TOM). Cette étude n’a pas recherché les facteurs d’imprégnation.
Toxicité
Toxicité chimique
La toxicité chimique de l’uranium est identique à celle du plomb. La dose létale pour l’être humain est de quelques grammes.
Le système digestif d’un adulte en bonne santé absorbe généralement entre 0,2 et 2 % de l’uranium contenu dans les aliments et l’eau. Le corps humain absorbe plus facilement les composés solubles de cet élément chimique. Plus de 95 % de l’uranium ingéré sont éliminés dans les selles, car ils ne sont pas absorbés par la muqueuse intestinale. Environ 67 % de l’uranium arrivant dans le sang sont filtrés par les reins et évacués dans les urines dans les 24 heures suivantes. L’organisme intégrera les deux tiers restants, notamment par accumulation dans les os, le foie (16 %), les reins (8 %) et les autres tissus (10 %).
L’OMS recommande un apport journalier en uranium de 1 à 2 µg à travers l’alimentation et l’eau courante. Il est conseillé pour un corps humain en équilibre avec son environnement d’avoir un taux d’uranium d’environ 90 à 150 µg.
Constituant une part essentielle des voies urinaires, le rein est l’organe le plus préjudiciable pour l’organisme en matière de toxicité chimique. Ainsi, il n’est pas étonnant que les professionnels exposés à l’uranium souffrent de troubles rénaux tels que les néphrites. La gravité de ces derniers dépend de la dose ingérée. L’incorporation d’uranium à forte dose provoque, par exemple, la dégradation des tubules proximaux et l’altération des structures glomérulaires. On retrouve aussi la nécrose de l’épithélium tubulaire parmi les effets directs. Tout cela cause une néphropathie sévère, une affection du rein en général. À une époque, certaines données ont affirmé que ces troubles étaient transitoires. En effet, une expérience sur l’animal a prouvé que l’épithélium lésé peut se régénérer après élimination des apports en uranium. Sa situation rénale revient ainsi à la normale après disparition de la source de l’exposition excessive. Plusieurs injections de fluorure d’uranyle (à hauteur de 0,66 ou de 1,32 mg U/kg de poids corporel) ont également été réalisées. Cependant, l’observation histologique démontre que, chez le rat, les cellules lésées ou mortes laissent la place à des cellules peu fonctionnelles et structurellement anormales.
Selon les estimations, le seuil de toxicité chimique rénale est de 16 µg/g de rein ou de 70 µg/kg de poids corporel. Concernant la dose létale 50 par voie orale, elle est de 204 mg/kg pour le rat de laboratoire et de 242 mg/kg pour la souris. Cette dernière est ainsi un peu plus résistante. En 1959, la valeur recommandée par la CIPR (Commission Internationale de Protection Radiologique) était de 3 µg/g dans le rein. Ce seuil est désormais controversé puisque des doses bien inférieures peuvent endommager les tubules proximaux. Par exemple, 0,7 à 1,4 µg/g d’uranium dans le rein suffisent pour induire ces dégâts et causer de la protéinurie (présence de protéines dans l’urine).
Quoi qu’il en soit, la néphrite tubulaire aiguë entraîne la mort de l’animal, car l’uranium non excrété par le rein s’y accumule et se fixe sur les cellules tubulaires proximales. Le milieu devient alors acide et le complexe uranium-uranyle se dissocie afin de se combiner éventuellement avec des composants de la membrane luminale. Les ions uranyle seront ainsi aptes à pénétrer la cellule et se concentreront dans les mitochondries. Ils se regrouperont également dans les lysosomes pour former des aiguilles de phosphate d’uranyle. Des études in vitro ont montré que l’uranium à forte dose peut aussi causer l’apoptose. Il s’agit du processus par lequel les cellules déclenchent leur autodestruction en réponse à un signal. Ce suicide cellulaire est causé par l’activation des enzymes protéases à cystéine et caspases 3 et 9 via des signaux intrinsèques des mitochondries. Des anomalies fonctionnelles telles que la polyurie, la protéinurie et l’élévation sanguine de l’urée et de la créatinine s’ajoutent aux symptômes de la néphropathie. Par ailleurs, les lésions sont plus réversibles et peu conséquentes si le taux rénal d’uranium est bas et que le temps d’exposition est court.
De récentes expériences sur modèle animal de maladie ont montré qu’une exposition chronique à de faibles doses d’uranium appauvri cause la diminution du taux de 1,24,25(OH)3D3. On parle ici de perturbation endocrinienne, car la radiotoxicité n’est pas en cause. Des changements des récepteurs nucléaires associés et des modifications moléculaires des enzymes de type cytochromes P450 (CYPs) sont également observés. Ces enzymes protéiques sont présentes dans la plupart des espèces végétales, fongiques et animales. Elles sont importantes pour le métabolisme puisqu’elles contribuent grandement à la détoxication de l’organisme. Cette même étude atteste que l’uranium (qu’il soit appauvri ou enrichi) affecte l’expression des gènes cibles de la vitamine D qui interviennent dans le transport du calcium au niveau rénal. On parle du RXR α (retinoic X receptor alpha) et du VDR (vitamin D receptor).
Radiotoxicité
Si la radioactivité de l’uranium se mesure en becquerels, sa radiotoxicité, quant à elle, se mesure en microsievert (μSv). Elle fait référence à l’effet du rayonnement ionisant de l’élément sur l’Homme. Qu’il soit enrichi ou non, l’uranium a toujours une radioactivité de type alpha, de l’ordre de 4,5 MeV. Ainsi, sa radiotoxicité dépend faiblement de sa composition, mais surtout de son activité massique. Elle est de l’ordre de 0,05 µSv/Bq (F) à 0,008 µSv/Bq (S) en ingestion et de 0,6 µSv/Bq (F) à 7 µSv/Bq (S) en inhalation. Les os et les poumons sont alors les organes critiques.
La toxicité chimique et la radiotoxicité de l’uranium seraient du même ordre de grandeur, bien que la deuxième l’emporte en cas d’enrichissement supérieur à 6 %.
Effets sur la reproduction
L’uranium est un élément reprotoxique, c’est-à-dire qu’il peut altérer la fertilité de l’homme ou de la femme, ou encore le développement de l’enfant à naître. En effet, son effet délétère peut venir de sa chimiotoxicité ou de sa radioactivité, voire des deux.
Chez l’animal, cet élément chimique peut impacter le système reproducteur. Chez le rongeur de laboratoire, la BHT (Barrière Hémato-Testiculaire) censée protéger le testicule peut être atteinte par le polonium, l’américium et le plutonium grâce à la sidérophiline. Également appelée transferrine, il s’agit d’une protéine sérique de type bêtaglobuline synthétisée par le foie. Une quantité considérable d’uranium est trouvée dans les testicules de rats chez lesquels un implant d’uranium a été posé dans le muscle d’une patte. Des souris abreuvées d’eau contenant de l’uranium et des rats ayant reçu des implants sous-cutanés de cet élément développent des cellules de Leydig altérées. Cela perturbe la création d’hormones stéroïdes et provoque la dégradation du sperme. Concrètement, les spermatozoïdes deviennent moins mobiles et moins nombreux. Ce phénomène explique la diminution du nombre de portées et celui des petits chez plusieurs espèces d’animaux ayant fréquemment pris de faibles doses de nitrate d’uranyle. Cette observation a été faite dès 1949. Par ailleurs, de l’uranium est détecté dans le sperme de soldats blessés par des munitions à uranium appauvri. Cela est dû à la présence des récepteurs à la transferrine dans l’épithélium des tubes séminifères humains.
Effets sur le développement
L’uranium provoque une toxicité embryonnaire et fœtale chez la souris ayant reçu un implant dans le muscle d’une de ses pattes. Cet élément chimique est tératogène (à l’origine d’une malformation fœtale) à plus fortes doses. L’embryon peut même mourir à une concentration 50 mg/kg/j pendant 9 jours, ce qui est 20 % inférieur à la dose létale pour l’adulte. Si une souris gestante boit 25 mg/kg d’uranium par jour, elle produit moins de petits. Par la suite, ces derniers auront également des problèmes de survie et de développement.
Les réglementations et les études se fondent généralement sur les effets sur l’animal. Pourtant, les nouvelles techniques de culture cellulaire utilisées lors des premières études ex vivo démontrent que les gonades humaines seraient plus sensibles à l’uranium.
Normes
Les normes et la DSENO (Dose Sans Effet Nocif Observable ou No Observable Adverse Effect Level – NOAEL – en anglais) sont intransigeantes. Certains estiment même que, du fait de sa radioactivité, l’uranium provoque des effets délétères, quelle que soit la dose.
Selon l’OMS, une eau est potable si sa teneur maximale en uranium est de 1,4 mg/l. S’il s’agit d’une eau de boisson courante, cette organisation recommande une concentration inférieure à 0,015 mg/l, notamment cent fois plus faible. Au Canada, la concentration maximale acceptable d’uranium dans de l’eau potable est de 0,02 mg/l.
Prix
Dans les années quatre-vingt, le prix de l’uranium était estimé entre 40 et 50 U$. Le cours a baissé jusque dans les années quatre-vingt-dix à la suite de la découverte de plusieurs gisements d’uranium économiquement exploitables. D’autres raisons peuvent aussi être citées telles que la limitation de la consommation d’électricité selon les politiques d’économie d’énergie. De plus, les réserves d’uranium militaire rassemblées dans le cadre de la guerre froide ont été transformées en stocks civils et employées dans les réacteurs nucléaires à cause de l’assouplissement des tensions américano-soviétiques.
Depuis 2001, le prix du kilogramme de cet élément chimique a augmenté et atteint un pic (298 $) en juin 2007. Plusieurs facteurs sont à l’origine de cette situation : la légère augmentation de production, la diminution des réserves et des évènements ponctuels. Parmi ces derniers, on retrouve l’incendie de la mine Olympic Dam se trouvant dans l’État d’Australie-Méridionale et l’inondation de celle de Cigar Lake au Canada.
En août 2010, le prix de l’uranium redescend à 102 $/kg. En janvier 2011, il était d’environ 138,9 $/kg. L’épuisement des réserves militaires prévu vers 2015 prévoyait une tendance du prix à la hausse.
En mars 2017, l’offre qui surpasse la demande et le faible coût de production des mines du Kazakhstan ont baissé considérablement le cours de l’uranium. Le kilogramme de l’U3O8 coûtait environ 52,9 $.
Par ailleurs, le prix de revient du kilowattheure varie moins par rapport à celui de l’uranium. Il est vrai que le coût du cycle du combustible représente près de 20 % du prix de revient du kilowattheure. Toutefois, ce cycle inclut l’ensemble des transformations chimiques et physiques que l’uranium subit pour devenir un combustible utilisable. Le coût de ce dernier constitue environ 5 % du prix final du kilowattheure nucléaire en 2014. Des études économiques montrent pourtant que le prix de cet élément chimique commence à influencer significativement le coût du kilowattheure d’électricité nucléaire. Cet effet est estimé à 110 ou à 220 €/kg d’U3O8.
Commerce
Selon les douanes françaises, la quantité d’uranium importée par la France est supérieure à la consommation qui lui est nécessaire. De ce fait, le surplus est exporté sous diverses formes. En 2014, le prix moyen de l’uranium exporté était de 36 000 €/t.