Répertorié sous le code E951, l’aspartame est un édulcorant artificiel composé de deux acides aminés naturels : l’ester méthylique de la L-phénylalanine et l’acide L-aspartique. Cette composition rend sa consommation inappropriée pour les personnes souffrant de phénylcétonurie. Il est couramment utilisé dans de nombreux produits et autorisé dans plusieurs pays. Aujourd’hui, il est employé dans l’Union européenne, aux États-Unis, au Canada, en Amérique du Sud et au Japon.
Description de l’E951
L’E951 est un édulcorant à faible teneur en calories. Sous forme de poudre cristalline blanche, il est légèrement soluble dans l’eau. Inodore, il est environ 200 fois plus sucré que le saccharose.
Il s’hydrolyse en présence d’humidité et forme de l’aspartylphénylalanine. Au-delà de 105 °C, cette réaction entraîne une recombinaison en dicétopipérazine, occasionnant une perte de son goût sucré. C’est pour cette raison qu’il est déconseillé pour les cuissons à haute température, comme la caramélisation.
Chimiquement, il est un dérivé de deux acides α-aminés naturels, formant un dipeptide. Selon les régulations européennes, il peut contenir des traces d’arsenic, de plomb et d’acide 5-benzyl-3,6-dioxo-2-pipérazineacétique.
Historique de l’E951
L’édulcorant populaire a été découvert de manière fortuite en 1965 par James Schlatter. Ce chimiste de la société G. D. Searle & Company travaillait à la synthèse d’un tétrapeptide pour un médicament anti-ulcère. Il a goûté par accident l’additif en humectant son doigt pour prendre un papier, découvrant ainsi son goût sucré. Cette découverte était inattendue, car ni l’acide aspartique ni la phénylalanine, ne sont sucrés par eux-mêmes.
L’E951 a été initialement approuvé aux États-Unis pour un usage dans les aliments solides en juillet 1974. La Food and Drug Administration (FDA) a suspendu l’autorisation en décembre 1975 en raison de doutes sur les études de Searle. Cependant, son utilisation a été rétablie pour les aliments solides en 1981 et étendue aux liquides en 1983.
L’additif a été approuvé par l’Organisation mondiale de la santé et l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture en 1981. Il a également reçu l’aval du Comité scientifique pour les aliments humains de la Commission européenne. En 1985, Monsanto a racheté G. D. Searle & Company, lançant la commercialisation de l’aspartame sous la marque NutraSweet. Son autorisation en France date de 1988, où il est classé sous le numéro E951.
Son brevet a expiré en 1992. En 1994, son utilisation a été harmonisée par l’Union européenne. Ainsi, son emploi en tant qu’édulcorant a été approuvé dans plus de 90 pays et, en 1995, l’UE a établi des critères de pureté pour l’additif.
En 2000, Monsanto a vendu NutraSweet. Depuis, il a été commercialisé sous plusieurs marques comme Natreen et Canderel. Après l’expiration des brevets européen et américain, d’autres fabricants (Ajinomoto, Merisant et Holland Sweetener Company) sont entrés en concurrence sur le marché.
En 2002, son innocuité a été reconfirmée par le comité scientifique de la Commission européenne et l’Agence française de sécurité sanitaire.
Structure et propriétés de l’E951
L’E951 peut être obtenu par plusieurs méthodes de synthèse.
Méthodes de synthèse de l’aspartame
La première méthode est une synthèse chimique employant l’acide aspartique et la phénylalanine comme réactifs. Cette technique offre un rendement d’environ 50 % et produit un isomère au goût amer, nécessitant une étape d’extraction supplémentaire.
Afin d’accroître l’efficacité de production, la méthode de synthèse enzymatique a été mise en place. Cette technique utilise la thermolysine comme catalyseur, opérant à une température ambiante et un pH de 7,5. Elle atteint ainsi un rendement proche de 95 %.
La méthode la plus récente et la plus efficace est la synthèse biotechnologique. Elle donne une production supérieure à 99,99 % et emploie également la thermolysine, mais réutilise l’un des produits du processus.
Propriétés de l’E951
L’E951 est moins stable à des températures élevées et à des pH éloignés de 4,3. Il n’affiche pas une bonne résistance à la cuisson. Il est sensible à la chaleur et se décompose rapidement à des températures supérieures à 150 °C. En présence d’eau, il se dégrade encore plus vite. Il possède deux constantes d’acidité à 25 °C : 3,1 et 7,9.
Après ingestion, il s’hydrolyse en acide aspartique, phénylalanine et méthanol. Il peut se décomposer en formaldéhyde, en acide formique et en une dioxopipérazine sous certaines conditions.
Contrairement au sucre, l’aspartame ne contribue pas à la formation de graisses ni à d’autres rôles métaboliques du sucre. Il peut participer aux réactions de Maillard avec les groupes aldéhyde.
Il est souvent utilisé en combinaison avec d’autres édulcorants pour compenser la diminution de la saveur sucrée due à sa décomposition. Un dérivé, le superaspartame, possède un pouvoir sucrant considérablement plus élevé.
Métabolisme de l’E951
L’ester méthylique d’aspartate de phénylalanine est clivé en dipeptide Asp-Phe et en méthanol, puis métabolisé en dioxyde de carbone ou en formaldéhyde. Le dipeptide Asp-Phe est ensuite démonté en acides aminés protéinogènes, intégrés dans les protéines ou convertis en oxaloacétate.
Dans le tractus gastro-intestinal, il se décompose rapidement, libérant de la phénylalanine, du méthanol et de l’acide aspartique.
L’E951 en nutrition
L’E951 possède une valeur énergétique de 4 kcal/g, semblable aux protéines. Toutefois, en raison de son pouvoir sucrant particulièrement élevé, une petite quantité suffit pour sucrer. Par conséquent, la quantité de calories fournie par l’aspartame dans les produits édulcorés est presque insignifiante. Une pointe de couteau, équivalant à 0,1 kcal, peut sucrer autant qu’une cuillère à café de sucre de 16 kcal.
En agroalimentaire, il est employé comme édulcorant et exaltateur d’arôme. Bien qu’il apporte légèrement plus de calories que le sucre, son pouvoir sucrant élevé le rend efficace en tant qu’édulcorant hypocalorique. L’E951 est aussi adapté aux diabétiques, car il n’augmente pas le taux de glycémie. Il est couramment utilisé dans des chewing-gums sans sucre, des boissons et gâteaux allégés, et plus de 600 spécialités pharmaceutiques.
Il est contenu dans les aliments diététiques, boissons, compléments alimentaires, confiseries, céréales pour petit déjeuner, produits de boulangerie, et bien plus encore. Il est autorisé dans les édulcorants de table selon les Bonnes Pratiques de Fabrication (BPF).
L’aspartame est efficace pour renforcer le goût des fruits et des arômes fruités. Il est stable en milieu acide, mais moins en milieu alcalin ou à haute température
Applications de l’E951
L’E951 est considéré comme sûr pour la consommation humaine dans plus de 90 pays. Il est approuvé par diverses agences de sécurité sanitaire, malgré certaines controverses.
Recherches sur l’aspartame
Des recherches menées sur les animaux suggèrent que l’aspartame pourrait perturber le métabolisme du sucre en influençant les bactéries intestinales. Ces produits, comme les aliments riches en sucre, peuvent provoquer une augmentation rapide de la glycémie. Ils pourraient entraîner une résistance à l’insuline, un symptôme clé du syndrome métabolique. Cependant, ces effets ne sont pas observés chez l’Homme lorsque l’E951 est consommé dans le cadre d’exercices physiques intenses.
Une recherche française et un article dans la revue Nature publié en 2014 suggèrent son implication dans le diabète de type II. Leur impact sur le microbiote intestinal en serait la cause.
Toutefois, une méta-analyse de 2015 a conclu que les édulcorants ne favorisent pas le diabète de type II. Ils n’induisent pas la surconsommation de sucre ou le cancer. Ils ne semblent pas non plus avantager la perte de poids ou aider à contrôler la glycémie chez les diabétiques.
Plusieurs analyses et publications ont soulevé des inquiétudes sur les risques de l’additif. Elles ont suggéré son implication dans les tumeurs cérébrales, les cancers et les effets sur le métabolisme. En 1996, une étude a évoqué un lien entre l’aspartame et une augmentation des tumeurs cérébrales.Des recherches menées par la Fondation Ramazzini en 2005 ont indiqué un effet cancérogène sur le cerveau chez des rats. Ces résultats étaient critiqués par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA) et d’autres agences pour des questions de méthodologie.